Article paru dans le journal "LE QUOTIDIEN" du 26 juillet 2008 (page 8)
Région Atsimo Andrefana
Systèmes agraires vulnérables
par Rivonala RAZAFISON
Les systèmes agraires de la région Atsimo Andrefana sont vulnérables aux changements climatiques. Tel a été l’objet du premier atelier régional de réflexion sur les effets du réchauffement global de la planète tenu à Toliara durant toute la journée de mardi 22 juillet dernier.
L’équipe du projet Adaptation aux changements climatiques en Afrique (Acca) à Madagascar, dirigée par le professeur Lilia Rabeharisoa du Laboratoire des Radios Isotopes, s’est rendue à la ville du soleil pour lancer les débats avec les responsables et partenaires locaux.
Le premier point saillant des échanges porte sur la faible exploitation des terres. Seuls 2,5% de la superficie totale estimée à 66 687 km² sont exploités à des fins agricoles. La riziculture, les plantations de maïs et de sorgho, l’élevage bovin et caprin et la pêche demeurent les activités dominantes. Le deuxième point encore plus crucial concerne le très faible niveau d’instruction des gens et leur adaptation aux bouleversements climatiques actuels. Sur les quelque 1 115 000 habitants, 880 850 constituent la population agricole, essentiellement rurale. Or 80% des ruraux dans l’Atsimo Andrefana ne savent ni lire ni écrire.
L’adaptation aux effets des changements climatiques est une véritable problématique dans toute la région. En effet, mieux connaître la vulnérabilité aux changements climatiques des systèmes agraires malgaches est un des objectifs du projet Acca Madagascar (2007-2010). Ce, afin de catalyser la réflexion et le dialogue entre les chercheurs et les acteurs du changement climatique, de diffuser les résultats pour un meilleur partage de connaissance relatives à la vulnérabilité des systèmes agraires et de renforcer les capacités nationales en matière d’adaptation. Pour cela, des plateformes de réflexion ont été créées à la base, en milieu rural. D’une part, elles permettent aux paysans, ignorant les connaissances scientifiques, de livrer leurs perceptions courantes des faits vécus. D’autre part, elles fournissent des bases de réflexion
reflétant effectivement les réalités vivantes. Tongondraza et Vontsira, paysans venus de Beza Mahafaly, ont été désignés par leurs pairs pour les représenter lors de l’atelier de mardi dernier à Toliara. Combien leur exposé a été informatif sur les réponses du monde rural malgache au réchauffement global. En réalité, leur intervention condense les résultats de multiples échanges des paysans entre eux. D’après leurs perceptions de l’état actuel des choses, le bouleversement des climats ont des répercussions perceptibles sur les activités agricoles de la région Atsimo Andrefana. Les saisons pluvieuses se raccourcissent. Les rendements diminuent nettement d’année en année pour certaines cultures comme le maïs. La période de récolte se déplace. De plus, il y en a ceux qui ont carrément cessé de planter le riz. Des maladies émergeantes détruisent les plantations et déciment à petit feu le cheptel. L’utilisation des espèces adaptées au climat aride de la région est conseillée. Le centre national Fofifa a déjà introduit une vingtaine de ces espèces dans la région. Leur diffusion et multiplication requiert la collaboration de toute une chaîne d’entités oeuvrant pour le monde rural à commencer par le Gtdr, la Maison des paysans… Bref, il est urgent d’harmoniser les interventions de tous les acteurs du développement rural chez nous. C’est un autre point important sur lequel la concertation est terminée. En outre, certaines traditions locales ou régionales présentent un blocage à l’adaptation. Et la volonté étatique de mobiliser le monde rural risque de se heurter à l’immobilisme des paysans compte tenu des changements climatiques. Par exemple, les paysans ne s’intéressent pas tellement à la culture de sorgho, une espèce la mieux adaptée pour Atsimo Andrefana à la place d’autres types de culture. Par ailleurs, c’est une priorité gouvernementale. Les effets du réchauffement global sont beaucoup plus dévastateurs que les conséquences des deux Guerres réunies. Les pays les moins avancés dont Madagascar figurent parmi les plus vulnérables à ce fléau planétaire.
La Grande Ile compte parmi les 10 pays en Afrique bénéficiaires du projet ACCA financé par le Centre de Recherche pour le Développement International (Canada). Les régions Alaotra-Mangoro, Atsimo Andrefana, Analanjirofo et Boeny sont sélectionnées pour sa mise en œuvre chez nous.